Céramique commune brune orangée biterroise

[Christophe Pellecuer]

La vallée du Libron, aux portes de Béziers, regroupe les principaux ateliers ayant produit cette céramique commune à 'bord noirci' et à 'patine cendrée' (Dodinet 1988), qui caractérise si bien les niveaux gallo-romains de la ville et les sites contemporains du territoire de la cité. Bien représentée en Languedoc occidental, elle est diffusée jusqu'en Roussillon; vers l'Est, elle a été reconnue jusqu'en Lunellois.
En l'état de la recherche (Pellecuer 1991), la céramique commune biterroise est attestée de l'époque flavienne jusqu'au début du IVe siècle. Elle connaît une large diffusion dans la deuxième moitié du IIe s. et dans la première moitié du siècle suivant. Fabriqués essentiellement pour une ville alimentée depuis la Protohistoire par une industrie locale, ces récipients utilitaires sont tournés dans des officines pouvant aussi réaliser des amphores ou des céramiques fines de haut niveau technique, comme la poterie à engobe plombifère. Ce contexte technologique ainsi qu'une forte demande du marché local doivent justifier l'introduction de formes étrangères dans le répertoire régional du Ier siècle, comme l'urne à col court, lèvre déversée triangulaire, dont la morphologie et la couleur tranchent avec celles des productions sableuses locales. Il est encore trop tôt pour savoir s'il s'agit d'une création ou d'un emprunt à l'instrumentum méditerranéen. Plus révélatrice de cette seconde tendance est l'adoption du plat à cuire et de la marmite, avec leur couvercle, produits et diffusés largement par les ateliers de l'Afrique romaine. Plus que des imitations dans le cadre d'une concurrence de marché, les exemplaires biterrois sont des succédanés -souvent très proches ou identiques aux modèles africains- qui permettent de satisfaire les besoins d'une consommation régionale.
Une pâte généralement fine dont la couleur évolue de l'orangé au rouge, avec une forte dominante des teintes brunes, la présence de particules brillantes -paillettes de mica contenues dans les argiles de la vallée du Libron- individualisent facilement cette production. La 'patine cendrée' se rencontre sur diverses formes du répertoire mais ce traitement de surface n'est pas systématiquement mis en ?uvre, ne pouvant être ainsi un critère sûr d'identification. D'importantes variantes d'aspect résultent de la multiplicité des ateliers et de leur longue période de fonctionnement. On signalera à ce propos la fréquence d'exemplaires surcuits, jusqu'à des exemplaires à l'épiderme bleu-noir, qui semblent caractéristiques des fabrications du IIIe s.
Plus d'une vingtaine de formes et variantes constituent le répertoire typologique de la céramique commune biterroise, mais l'inventaire est loin d'être achevé. Une approche quantitative montre que cette variété morphologique cache en fait de fortes spécialisations de production. Près de la moitié des vases commercialisés sont des urnes, probablement de fonction polyvalente (urne à lèvre triangulaire A1). Un tiers est constitué par des récipients de cuisson reprenant les formes les plus courantes de la céramique africaine de cuisine (AF-CUI 23A=C3; AF-CUI 196=C1 et variantes; et AF-CUI 197=B1). La part restante comprend des formes ouvertes, peut-être en relation avec la préparation des aliments (bol caréné B3 par exemple), et des formes fermées à destination de la table (gobelet ansé G2 et cruche ovoïde G3).

Etudes régionales de référence pour la céramique commune brune orangée biterroise

Languedoc occidental: Dodinet 1988; Pellecuer 1991.

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