Céramique non tournée protohistorique du Languedoc occidental


[Michel Passelac]


Comme dans les régions voisines, la céramique non tournée du Languedoc occidental fait appel à des techniques de fabrication traditionnelles qui se maintiennent jusqu'à la romanisation et perdurent même à l'époque impériale (cf. CNT-ROL). Façonnée le plus souvent au colombin, ou, pour les petites pièces, à partir d'une balle d'argile, cette céramique présente un dégraissant toujours apparent dans les cassures. Dans les bassins alluviaux du Languedoc occidental, il est le plus souvent sableux, et son calibrage varie beaucoup en rapport avec la taille et de la fonction des vases. Les traitements de surface sont très divers, du polissage, quasi généralisé au début de l'Age du Fer, jusqu'au rugosage ou au peignage, dont la pratique ne cesse de se développer jusqu'à la fin de la période. Ici encore, leur mise en ?uvre dépend de l'usage des récipients, et peut s'appliquer sélectivement aux différentes parties d'un même vase. Les décors sont rares en Languedoc occidental au début du Premier Age du Fer: incisions répétées sur les hauts de panse des urnes, quelques motifs lissés et excisés. A partir du milieu du VIe s. les incisions et les cordons se développent sur les urnes, les gobelets sont souvent décorés, les préhensions nombreuses. Le décor incisé des urnes se perpétue sans grand changement jusqu'à la fin de la Protohistoire.
Les découvertes de structures de cuisson se rapportant à ces productions sont rares pour la première partie de l'Age du Fer où devait dominer la cuisson en meule, ou dans des fours très sommaires. Au deuxième Age du Fer, sont connus des fours à tirage vertical qui permettent d'assurer une atmosphère fumigée plus régulière. La dispersion de la fabrication de l'échelon familial à l'échelon artisanal, les nombreux faciès régionaux et micro-régionaux donnent à cette céramique une grande variabilité, qui gêne l'élaboration d'une typologie et limite son usage. Cette situation est particulièrement sensible en Languedoc occidental, marqué par l'exubérant faciès Grand-Bassin I dans différentes expressions, et soumis aux influences venues d'Aquitaine, des Pyrénées et de la Péninsule Ibérique.
La région a livré un stock considérable de céramique non tournée, principalement à l'occasion de fouilles de nécropoles du premier Age du Fer. La majorité des études ont été produites à partir de tels sites et ont abouti à des typologies limitées dans le temps et l'espace (Dedet 1974C; Nickels 1989A; Solier 1976; Passelac 1981). Elles sont utilement complétées par celle de l'habitat de Carsac (Rancoule 1986A). Si nous ne disposons pas, pour l'ensemble de la région, d'étude de synthèse après celle de M. Louis, O. et J. Taffanel (Louis 1960), de précieux travaux micro-régionaux analysent ce type de matériel sur la longue durée (Rancoule 1984A; Garcia 1993A).
Dans un souci d'harmonisation avec les classements des régions voisines, celui qui est proposé ici comporte les cinq groupes définis par une lettre, auxquels on a adjoint celui des gobelets, particulièrement présents dans notre région :
A: formes particulières (entonnoirs, faisselles).
C: vases ouverts évasés ou 'coupes'
J: vases ouverts profonds ou 'jattes'
G: vases fermés pour boire ou 'gobelets'
U : vases fermés ou 'urnes'
V : couvercles.
Dans chaque groupe, les formes sont numérotées en chiffre arabe, les variantes à l'intérieur des formes désignées par une lettre minuscule à la suite de ce chiffre, les sous-variantes éventuelles par un nouveau chiffre arabe à la suite de cette lettre.
Pour plusieurs ensembles de formes d'un même groupe, des séries sont définies par un numéro seul: ces numéros génériques doivent permettre de prendre en compte les fragments, (notamment les bords) qu'on ne peut attribuer à une forme ou une variante précise.
En Languedoc occidental, la proportion de céramique non tournée varie considérablement selon les époques et la situation géographique. Au Ve s., par exemple, elle peut atteindre 98 % dans certains sites de l'intérieur, comme l'Agréable, et représenter moins de 1 % près du littoral, en milieu très hellénisé, comme à Béziers ou dans certaines couches de Bessan (Ugolini 1991; Nickels 1989). Au deuxième Age du Fer, les vases non tournés sont généralement moins nombreux, du fait du développement des importations méditerranéennes et des fabrications régionales de céramiques tournées. D'où, pour cette époque, un répertoire nettement plus limité qu'en Provence ou Languedoc oriental.
La fonction comme la qualité de la céramique non tournée sont totalement tributaires de sa place dans l'équipement domestique. Là où elle est supplantée par la vaisselle tournée, la céramique non tournée est médiocre et réservée aux usages culinaires. En revanche, lorsque sont rares les vases à boire méditerranéens, gobelets et coupes non tournés atteignent une grande qualité.
En aucun cas, la classification proposée ici ne dispensera de se référer aux études définissant des faciès micro-régionaux.

Etudes régionales de référence pour la céramique non tournée protohistorique du Languedoc occidental:

Lieux de production: Taffanel 1955; Rancoule 1970.
Premier Age du Fer: Dedet 1974C; 1975; Garcia 1993A; Guilaine 1986; Nickels 1989; 1989A; Passelac 1971; 1981; 1984; Rancoule 1986A; Solier 1976; Taffanel 1960.
Deuxième Age du Fer: Garcia 1993A; Jannoray 1955; Mouret 1928; Rancoule 1980; 1984A.

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