Céramiques communes méditerranéennes tardives

[Claude Raynaud]


Souvent considérées comme des produits locaux faiblement diffusés, les céramiques communes n'en ont pas moins fait l'objet, dans certains cas, d'une large commercialisation à l'échelle du bassin méditerranéen. L'exemple des productions dites 'africaines de cuisine' est le mieux connu et reste le plus caractéristique de ce phénomène, mais l'approfondissement des études céramologiques met l'accent sur l'existence d'autres productions que l'on dénommera 'céramiques communes méditerranéennes d'importation'. Ce courant, désormais bien connu pour les derniers siècles de l'Antiquité, reste à étudier pour le début de la période impériale. En effet, l'apparition de communes africaines en diverses provinces occidentales, dès les dernières décennies du Ier s. de notre ère, laisse envisager l'existence d'autres commerces restant à identifier.
D'abord révélées par des publications consacrées aux niveaux tardo-antiques de Carthage (Fulford 1984), Rome (Whitehouse 1982), Ravenne (Fiumi 1983), Naples (Arthur 1985), Tarragone (TED'A 1989), etc..., ces productions n'avaient fait l'objet d'aucune synthèse jusqu'à une enquête systématique réalisée en Provence et Languedoc (CATHMA 1987). Cette étude, consacrée elle aussi à la fin de l'Antiquité romaine (IV-VIIème s.), a souligné la présence régulière, à côté des céramiques régionales très largement majoritaires et de facture homogène, d'une série de productions plus variées et minoritaires. Se distinguant par les formes des vases, étrangères aux traditions locales, et par l'hétérogénéité des pâtes, ces céramiques ne pouvaient se rattacher aux fabrications régionales et trouvaient par contre d'abondants parallèles dans le bassin méditerranéen.
Une typologie a été établie par le groupe CATHMA à partir du matériel provençal et languedocien et de celui déjà publié dans d'autres parties du monde méditerranéen. Elle comprend trente et un types répartis, selon leur pâte et leurs critères morphologiques ou décoratifs, en quatre grands groupes d'origine supposée: italique, africaine, proche-orientale ou indéterminée. Trois familles de vases sont principalement recensés: des cruches (5 types), des mortiers (6 types) et surtout des vases à feu, jattes, marmites et urnes (16 types). Les productions supposées africaines, de loin les plus nombreuses, réunissent les céramiques les plus soignées, approchant parfois la qualité de la vaisselle fine. Elles livrent 12 types (types 1, 2, 3, 6, 8, 9, 10, 12, 18, 21, 24 et 27). Les productions supposées de Méditerranée orientale, de qualité moyenne, viennent au second plan et concernent 9 types (types 4, 5, 15, 16, 17, 23 et 28A, B, C). Les céramiques attribuées à la péninsule et aux îles italiennes se distinguent -à une exception près- par leur aspect fruste résultant d'une fabrication modelée ou au tour lent. On en connaît 8 types (7, 13, 14 19, 20, 22, 25 et 26). Enfin, 2 types rares n'ont pu être rattachés à une provenance précise (types 11 et 29).
On ne peut nier les incertitudes pesant encore sur l'origine de ces productions, de sorte qu'il paraît commode de grouper ces diverses céramiques dans une catégorie 'communes d'importation méditerranéenne'. En effet, malgré de premières analyses physico-chimiques, encore partielles, l'attribution des origines reste provisoire. La série dont l'identification semble la plus évidente est celle des vases à pâte rouge ou orangée, dure, évoquant fortement une origine africaine, et l'hypothèse se trouve confortée dans la plupart des cas par l'abondance particulière des pièces de comparaison découvertes à Carthage. L'incertitude demeure cependant, raison pour laquelle il eût été imprudent de rattacher ces productions à la catégorie 'africaine de cuisine', dont elles se distinguent de surcroît par des nuances de pâte, par une moindre standardisation des formes et par une typologie spécifique. Seul le type 27 peut être exclu de ce groupe et attribué à l'Africaine de cuisine (AF-CUI CVII-9). Pour les types 13, 14 et 19, l'origine ligurienne, suggérée par la carte de répartition des découvertes et l'étude des productions de l'atelier de Vintimille (Olcese 1992), se trouve confirmée par une série d'analyses de M. Picon (d'Archimbaud, à paraître). Dans d'autres cas, notamment les séries orientales, seules des considérations sur une 'ambiance' typo-technologique fondent les attributions géographiques qui restent à confirmer.

Etude régionale de référence pour les céramiques communes méditerranéennes

Provence et Languedoc : CATHMA 1987 et 1992.

Types