Céramique peinte ibéro-languedocienne

[Eric Gailledrat]

La question de la céramique ibérique peinte en Languedoc occidental et Roussillon renvoie au problème de l'identité culturelle de cette région, rattachée au complexe ibérique tel qu'il apparaît sur les franges méridionales et orientales de la péninsule.
Relevant de sources d'influence diverses (indigènes, phénico-puniques, grecques), cette céramique présente une unité de style indéniable, permettant d'en faire l'un des marqueurs privilégiés de la culture matérielle ibérique.
En Languedoc-Roussillon, son étude a été rendue complexe par le poids de la présence grecque, à Marseille, Agde et Ampurias. La reconnaissance du caractère 'ibérique' de productions régionales cohabitant avec des séries importées depuis l'Espagne s'est faite en plusieurs temps. L'accent a été mis tout d'abord sur l'importance des composantes helléniques: on trouve ainsi utilisée l'appellation d''ibéro-ionien' (Coulouma 1948), puis de céramique 'de tradition ionienne' pour les séries mises au jour à Ensérune (Jannoray 1955), alors qu'à la même époque O. et J. Taffanel utilisent plus prudemment le terme de 'céramique peinte à l'ocre' (Louis 1955). C'est à J.-J. Jully que l'on doit d'avoir mis l'accent sur la composante phénico-punique dans les formes et décors de ce groupe; c'est ce même auteur qui a proposé le terme d' 'ibéro-languedocien' (Jully 1966; 1972; 1975B; 1980A). Par la suite, Y. Solier parle de 'céramique de style ibéro-punique' au sein d'une 'culture ibéro-languedocienne' (Solier 1978). Plus récemment s'est posé le problème de la mise en évidence de critères permettant d'isoler les productions ibériques en général des 'pseudo-ioniennes' (Py 1979B). L'appellation de 'claire peinte' (Ugolini 1991), fort vague au demeurant, reflète la difficulté rencontrée devant le caractère ambivalent (grec et/ou ibérique) de certains mobiliers.
La distinction des séries régionales et de celles qui ont été importées depuis l'Espagne autorise la reconnaissance de plusieurs ensembles, se mettant en place au moins depuis le milieu du VIe s. av. n.-è. A partir de cette date, la production de céramique peinte à décor géométrique connaît en Languedoc occidental et Roussillon un grand succès, encore amplifié au siècle suivant. Le IVe s. voit progressivement disparaître cet engouement, sauf dans la basse vallée de l'Orb où un faciès original conserve alors une grande vitalité.
Le Roussillon (Ruscino, Elne, Salses...) constitue un ensemble régional bien défini, avec, du VIe au IVe s. av. n.-è. un nombre d'ateliers probablement assez réduit, produisant essentiellement des jarres bitronconiques, munies ou non d'anses, ainsi que des urnes à col cylindrique, homogènes du point de vue technique et stylistique.
Les basse et moyenne vallée de l'Aude (Pech-Maho, Montlaurès, Mailhac...) constituent durant la même période l'ensemble le plus dynamique, avec plusieurs ateliers travaillant selon une technique similaire et avec un répertoire décoratif semblable. Ces ateliers ont également produit en majorité des jarres bitronconiques, mais d'autres formes sont assez bien représentées (gobelets carénés, cruches à embouchure ronde...).
La basse vallée de l'Orb, avec pour sites-clé Ensérune et Béziers, présente un faciès particulier à partir du Ve s. et jusqu'à la fin IVe s., voire au-delà. Ce faciès se caractérise par une variété des formes plus grandes, avec des emprunts évidents au monde grec: à côté de la jarre (plutôt ovoïde, à pied bas annulaire), on retrouve l'urne, la cruche à embouchure ronde ou trilobée, le gobelet caréné, plus rarement le cratère, la coupe à anses...
La basse vallée de l'Hérault représente un dernier ensemble représentant le point d'avancée ultime vers l'Est de la culture matérielle ibéro-languedocienne. Une production, essentiellement des jarres bitronconiques, s'y développe très tôt, perdurant aux VIe -Ve s. et évoluant par la suite vers le style du 'subgéométrique héraultais' (voir CL-HERAULT).

Etudes régionales de référence pour la céramique peinte ibéro-languedocienne

Languedoc oriental: Py 1990, 597-599.
Languedoc occidental, Roussillon: Bacou 1983; Claustres 1987; Coulouma 1943; 1948; Taffanel 1955; 1960; Jannoray 1949; 1949A; 1955; Jully 1966; 1972A; 1977C; 1980A; Passelac 1981; Rancoule 1984; 1987 ; Solier 1961; 1968; 1978; Ugolini 1991.

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