Céramique africaine de cuisine

[Claude Raynaud]


On doit à N. Lamboglia l'identification et la première classification de ces céramiques commercialisées en masse autour de la Méditerranée occidentale tout au long de la période impériale (Lamboglia 1950, 203). D'abord séparées en trois groupes en raison de nuances morphologiques: 'a strisce' pour les vases à fond strié, 'orlo annerito' ou 'patina cenerognola' pour les vases à bord noirci ou portant une patine grise, ces productions voisines furent intégrées par J.W. Hayes dans sa typologie globale des productions tardives d'Afrique du Nord (Hayes 1972), avant d'être finalement regroupées sous l'appellation de 'céramique de cuisine', aujourd'hui la plus communément usitée (Atlante 1981, 208-227).
Cette catégorie rassemble des vases d'usage courant liés aux activités culinaires: plats à cuisson, jattes, marmites et couvercles. Leur pâte est généralement de couleur rouge-orangé, analogue à celle de la céramique Claire A, quoique un peu moins fine. La surface des vases présente plusieurs caractères, dissociés ou réunis selon les productions, contribuant largement à la spécificité de cette céramique. Une patine cendreuse obtenue lors de la cuisson des vases (gris clair à sombre), couvre souvent le bord et/ou le col des vases, à l'extérieur seulement; un revêtement argileux (vernis ou engobe) revêt la paroi interne de certains plats, et plus rarement leur paroi externe; des bandes polies d'un ton plus sombre que la pâte ou des stries concentriques garnissent la paroi externe des cols et/ou des fonds; des cannelures marquent la paroi interne des marmites à panse cylindrique. Certains vases de facture plus soignée portent sur l'épiderme externe, plus rarement sur la totalité du vase, un vernis opaque identique à celui de la céramique claire A, et plus exceptionnellement un vernis brillant comparable à celui de la claire C. Malgré cette qualité supérieure qui les avait initialement fait ranger parmi la vaisselle fine, la forme de ces vases, plats à cuire, marmites à fond bombé, incite plutôt à les classer dans la vaisselle culinaire.
Quoique la localisation des ateliers producteurs reste inconnue, plusieurs indices, carte de densité des découvertes, chargement d'épaves, invitent à situer la zone de fabrication en Tunisie, sans doute dans la région de Carthage (Atlante 1981, 209-210), mais également ailleurs (Gabès...). Au Ier s. de n.è., la diffusion touche l'Algérie, la péninsule ibérique et l'Italie, et plus discrètement le littoral Gaulois. C'est à partir du milieu du IIe s. que la diffusion connaît sa plus grande extension, englobant l'ensemble de la Méditerranée occidentale ainsi que la Tripolitaine et la Dalmatie. Après son apogée au IIIe et dans la première moitié du IVe s., la commercialisation connaît un net recul à la fin du IVe et au Ve s. La production se poursuit durant cette période mais on observe cependant un net fléchissement dans la diffusion, seuls les sites urbains utilisant encore couramment cette vaisselle tandis qu'elle s'affaiblit sur les sites ruraux, comme le montre l'exemple du littoral Gaulois (Raynaud 1990, 294-295). Sans grand changement dans le répertoire de formes, la production se poursuit durant tout le Ve s. et au début du VIe s., mais cette ultime phase ne semble pas connaître une large diffusion, seules les fouilles de Carthage livrant encore des proportions conséquentes.
L'étude la plus complète sur la céramique africaine de cuisine est incontestablement le chapitre de l'Atlante delle forme ceramiche (Atlante 1981), reprenant les typologies antérieures en les complétant par un copieux catalogue d'exemplaires inédits. L'ouvrage pêche cependant par une démarche pointilleuse à l'extrême, aboutissant à la négation de toute typologie, chaque variante de forme constituant un type. La typologie de Hayes présente les avantages et les inconvénients inverses: un classement simple et efficace, regroupant les variantes au sein de types clairement définis, mais desservi par quelques lacunes et par l'imprécision des datations, imputables à l'ancienneté de l'ouvrage (Hayes 1972). C'est un panachage de ces deux classifications qui a été retenu dans le présent code typologique: la numérotation de Hayes demeure la base de la classification, mais celle-ci est complétée par les formes nouvelles livrées par l'Atlante, dont on a aussi retenu les datations pour corriger celles de Hayes.

Etudes de référence pour la céramique céramiques africaines de cuisine

En général : Hayes 1972: Atlante 1981.

Types